Profitons de cette semaine qui aura peu d’impact dans la NFL pour parler d’un sujet qui me passionne et dont on aura pas beaucoup le temps de parler d’ici la grande annonce dans la semaine du SuperBowl : le Temple de la renommée.
Brett Favre sera un membre du Temple de la renommée du Football professionnel cet été. Sa candidature ne fait aucun doute, il sera la tête d’affiche de la cuvée 2016. Prenons quelques lignes pour discuter de sa place dans l’histoire.
La légende est amplifiée par sa personnalité. On se souvient des entrevues humoristiques ou émotives et des conférences de presses émotives (ses retraites, oui, mais aussi sa dépendance aux anti-inflammatoires et le cancer se de son épouse). Il était du matériel en or pour NFL films, alliant à perfection le plaisir du football (les blagues de pet sur les lignes de côté, les jeux improvisés et inhabituels) avec les grandes performances comme le soir où son père est décédé ou la longue passe de touché au Superbowl (sur un « audible ») après lequel il courrait comme un enfant le matin de Noël, sans son casque.
On a aussi tendance à associer son succès à sa longévité seulement. C’est comme si son excellence était dans l’ombre de son record absolument impensable (et possiblement le record moderne le plus difficile à battre du sport professionnel) de 321 matches consécutifs. Et avouons-le, il a grandement terni son image en se comportant comme un homme grincheux, individualiste et amer à la fin de sa carrière. On se souvient de son interception en supplémentaire au match de championnat qui a empêché les Packers d’affronter les Patriots parfaits au Superbowl en 2007, et celle en supplémentaire du match de championnat de 2009 pour les Vikings face aux Saints. On oublie qu’il avait 38 et 40 ans lors de ces matches. Combien de quarts ont traîné sur leurs épaules une équipe en match de championnat à 40 ans?
Quand on compare les carrières de joueurs qui ont joué longtemps, j’aime bien oublier l’aspect longévité et me concentrer sur les meilleures années d’un joueur, pour voir s’il a été un joueur dominant. Dans le cas de Favre, à cause de tous les facteurs mentionnés précédemment, on oublie le jeune quart exhubérant et dominant du milieu des années ’90. Le leader incontesté d’une équipe dont le cœur battait à son rythme, bâtie autour de lui. Et à cette époque, on se demandait déjà si on devait le considérer comme le meilleur de tous les temps. S’il avait pris sa retraite en 2004, à 35 ans, c’est dans cette conversation qu’il serait dans l’histoire, on oublierait tout le reste en fin de carrière qui est venu ternir son héritage.
En 1995, 1996 et 1997 il est devenu le premier joueur à gagner le MVP trois fois, trois années de suite, menant les Packers au match de championnat en ‘95, remportant le Superbowl en ‘96 et y retournant pour une défaite face aux Broncos en 1997. Ses 38 (1995) et 39 (1996) passes de touché pendant ces saisons étaient à l’époque les 3e et 4e meilleures saisons de l’histoire. Peu peuvent prétendre avoir connu une séquence de 3 saisons aussi dominantes individuellement avec autant de succès d’équipe.
Un autre élément de la carrière de Favre qui est souvent oublié, c’est qu’il a connu ses meilleures années sans avoir de personnel d’élite autour de lui. Après la retraite prématurée de Sterling Sharpe en 1994, il n’a plus jamais eu accès à un receveur d’élite. Je n’ose pas imaginer les statistiques qu’il aurait générées avec Sharpe pendant disons 5 autres saisons. Ses receveurs #1, au fil des années, ont été Robert Brooks (choix de 3e ronde), Antonio Freeman (choix de 3e ronde), Donald Driver (7e ronde). On lui a donné une fois un TE en 1ere ronde, Bubba Franks, qui a connu une carrière plutôt décevante. L’attaque au sol derrière lui était l’affaire des Edgard Bennett (4e ronde), Dorsey Levens (5e ronde), Ahmad Green (3e ronde). Aucun talent exceptionnel là-dedans…Pour comparer deux longues carrières glorieuses, Peyton Manning a lancé près de la moitié de ses passes de touché en carrière à Marvin Harrison (1ere ronde, futur membre du Temple), Reggie Wayne (1ere ronde, potentiel membre du Temple), Dallas Clark (1ere ronde) et Demaryius Thomas (1ere ronde). Il a commencé sa carrière avec Marshall Faulk (Temple), puis au fil de sa carrière avec les Colts, ceux-ci ont utilisé 3 fois leur choix de 1ere ronde sur un porteur de ballon, dont Edgerrin James (4e pick overall, semi-finaliste au Temple) qui a supporté Peyton pour une solide partie de sa carrière.
Jerry Rice a grandement contribué au succès de Montana et de Steve Young, bien que Montana ait gagné 2 Superbowls avant l’arrivée de Rice, avec des gars comme Dwight Clark et Freddie Solomon. Jim Kelly a joué la majorité de toute sa carrière avec Thurman Thomas (Temple), Andre Reed (Temple) et même James Lofton (Temple). Troy Aikman avait Michael Irvin (Temple), Emmitt Smith (Temple), et la meilleure OL des 30 dernières années. Tom Brady n’avait jamais lancé 30 passes de touché avant d’avoir Randy Moss, et, puisqu’il est devenu un passeur prolifique par la suite, on oublie qu’avant l’an passé, pour ses autres Superbowls il était surtout le « game manager » d’une équipe qui était bâtie sur la défensive et l’attaque au sol. Favre, comme John Elway et Dan Marino avant lui, était la pièce centrale autour de laquelle l’équipe était bâtie. Il connaissait du succès avec du talent de 2e niveau autour de lui, et rendait tout le monde autour de lui meilleur.
Il n’a gagné qu’un seul Superbowl, ce qui le limitera toujours dans la discussion quand on le compare à Brady et à Montana, je vis bien avec ça puisque contrairement à ces deux autres légendes, on ne peut pas dire qu’il élevait son jeu d’un cran quand les enjeux étaient au maximum. Mais je crois que Favre doit être le premier mentionné dans le groupe suivant, avec Elway, Peyton et Dan Marino, quand on parle des meilleurs QB’s des 40 dernières années.
Et c’est avec ce narratif que j’espère qu’il enfilera le veston doré au mois d’août.
